dimanche 24 février 2013

Les vertus psychologiques de la patisserie traditionnelle française ou comment j'ai commencé à faire concurrence au chute du Niagarra

 
 
La semaine dernière, je suis allée à la boulangerie. Quel scoop, n'est ce pas. Je voulais emporter des gateaux pour ma mère (que je ne déespère pas de faire un jour à nouveau passer au dessus de la barre des 50 kilos). Au moment de faire mon choix, l'équivalent pâtissier de la mine antipersonnelle m'attendait surnoisement dans la vitrine réfrigérée. Lorsque mon regard s'est posé sur une rangée de superbes millefeuilles glacés, j'ai réalisé que je n'en achèterai plus jamais pour papa et cela d'un seul coup à rendu sa mort plus tangible que les dizaines de gerbes de fleurs, que les résilations de contrats, que les caisses remplies de vêtements.
 
Je n'ai pas pleuré à l'enterrement de mon père, fille indigne que je suis. Il y avait tellement de choses à faire, tellement de gens à voir, tellement d'attentions périphériques que je devais accorder à ma mère. Après je n'ai pas vraiment pleuré beaucoup, pas assez en tout cas, au point où je me demandais pourquoi perdre l'homme le plus précieux de ma vie ne parvenait pas à me faire pleurer. J'aurai voulu me répendre en sanglots, et n'arrivais pas à me laisser tomber.
 
C'est ce que je fais depuis la semaine dernière. Je pleure comme cela ne devrait pas être permis par le Grenelle de l'environnement, tellement je gaspille de l'eau et des mouchoirs. Je réalise que ce n'est pas tellement le passé qui me fait mal, mais l'avenir sans lui. Tout ce qui arrivera et auquel il ne participera que dans notre pensée.
 
Il n'aura jamais de petits enfants, jamais de gendre. Il ne mettra jamais les pieds dans l'observatoire qu'il avait dessiné. Il n'ira jamais en Inde. Tout cela dans un millefeuille qui restera dans la vitrine puisque je n'ai plus personne pour qui l'acheter.

Bilan, les boulangeries deviennent pour moi aussi fréquentables que des centrales nucléaires japonaises.

3 commentaires:

  1. Courage! Je pense fort à toi ma jolie, et ton colis est bientôt prêt! J'attends juste de trouver un carton adéquat afin de pouvoir tout t'envoyer :) Bisous

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  2. Ton article est tellement juste et touchant. Tout est dit avec ce millefeuille. Pas plus tard que vendredi passé, j'ai discuté de la mort avec mes parents et c'est étrange parce que je n'arrive pas à considérer ce "passage" comme un événement triste. Bien sûr, c'est effroyable pour ceux qui restent, mais quelques expériences m'ont amenée à croire que la mort n'est pas une fin en soi et que l'issue est positive.

    J'ai une jolie histoire à te raconter à ce sujet. Ma copine Aline m'a raconté que son grand-père avait dit à sa grand-mère avant de mourir qu'il lui ferait un signe pour qu'elle ne s'inquiète pas quand son heure serait venue. Un soir quand elle était très malade, elle a entendu la voix de son mari lui dire que tout allait bien se passer pour elle et qu'il l'attendait. Le plus étrange, c'est que les chiens ont réagi ce même soir dans la maison comme s'ils sentaient qu'il était là.

    Je t'embrasse et pense bien à toi.

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